Si les émeutes survenues du 27 juin au 5 juillet ont laissé des plaies ouvertes dans la société française, elles ont aussi occasionné des cicatrices durables dans le paysage des villes. Etablissements scolaires, mairies, lieux de culture, mais aussi immeubles d’habitation, de nombreux bâtiments publics et privés ont été incendiés ou dégradés.
Face à ce constat, le Gouvernement a décidé d’agir en urgence pour pouvoir lancer les chantiers de démolition, reconstruction ou réhabilitation -selon la gravité des dégâts occasionnés- le plus vite possible.
Un projet de loi pour accélérer la reconstruction des bâtiments démolis au cours des violences urbaines
C’est pourquoi l’Assemblée nationale a adopté jeudi 20 juillet un projet de loi relatif à l’accélération de la reconstruction des bâtiments dégradés ou démolis au cours des violences urbaines par 260 voix contre 87. Le projet de loi avait été déposé au Sénat le 13 juillet, qui l’a adopté le 18 juillet à l’unanimité. La commission des Affaires économiques l’a examiné le mercredi 19 juillet et l’a adopté sans modification.
Les trois articles ouvrent des dérogations aux règles du droit de l’urbanisme, aux règles de passation et de dévolution des marchés publics et déterminent des règles de financements pour la reconstruction.
Il faut dire que le volume de chantiers à lancer est conséquent. Rapporteur du texte, Jean-Paul Mattei, député MoDem, a fait les comptes devant l’Assemblée nationale. "S’il est trop tôt encore pour connaître parfaitement l’étendue des dégradations subies dans les territoires, certaines estimations initiales font état de 750 bâtiments publics dégradés ou détruits, peut-être le triple en ce qui concerne les bâtiments privés", a chiffré le parlementaire, précisant que "273 bâtiments des forces de l’ordre, 168 écoles et 105 mairies auraient notamment été détériorés".
Une loi sur mesure, mais une mesure d’exception pour reconstruire après les émeutes
Quant au ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu, il a insisté sur le caractère exceptionnel de ce texte se présentant sous la forme de trois articles. "Ce qui est acceptable en temps normal qu’à la marge se justifie pleinement dans le cas présent", a-t-il déclaré en substance.
Dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, de nombreux édifices publics et privés ont été affectés par les violences urbaines. Dans l’agglomération lyonnaise, on se souvient par exemple de l’incendie qui a embrasé quatre étages d'un immeuble au 5 boulevard Honoré de Balzac à Villeurbanne suite à un tir de mortier.
Ou encore de la destruction des bâtiments du BTP CFA de Roanne, touchés à deux reprises par des incendies volontaires les 1er et 2 juillet. Compte-tenu des dégâts occasionnés, les 160 élèves ne devraient d’ailleurs pas réintégrer les locaux à la rentrée. Et le devenir même de l’établissement sur ce site est posé. A l’image de ce cas précis, l’adoption de cette loi avant la trêve estivale pourrait permettre de dénouer certains dossiers épineux.
Que comprend précisément la loi ?
L’article 1 habilite le gouvernement à prendre par ordonnance des mesures aménageant le droit de reconstruction des bâtiments à l’identique ou moyennant des modifications limitées, en autorisant l’engagement de certains travaux dès le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme et en accélérant les procédures de délivrance des autorisations d’urbanisme.
L’article 2 va permettre de prendre des mesures dérogatoires aux règles de la commande publique, en matière de publicité préalable et de recours aux marchés publics globaux.
Enfin, l’article 3 vise à faciliter le financement de la réparation et de la reconstruction rapide des bâtiments et équipements publics dégradés. Le cadre juridique applicable aux subventions d’investissement versées aux collectivités territoriales sera adapté "afin de permettre un subventionnement au-delà du plafond légal de 80 %" peut-on lire sur le site de l’Assemblée.